Le vieil homme et la Caissière en rencontre d’hier

Bonjour,
Pour le plaisir enrobé de son papier argenté, un oeuf en chocolat de mémoire d’il y a quelques jours.
Un petit rien en hasard de vie, curieux de tout
Bien à vous.

Hier,

Il me fallait des ballons, vous savez, des ballons de baudruche. J’aime bien ce mot de baudruche. quand j’étais petit, j’imaginais des ballons fait avec l’oiseau, entre autruche et baudruche quand on est petit, il n’y a qu’un rêve.
Bon, pas facile à dégotter de nos jours, partout, je trouve des ballons, soit trop petits, soit, avec de la pub déguisée.
J’en ai trouvé mais cette quête m’a permis une belle rencontre, la voilà…

Voilà, ça s’est passé à la caisse de Carrefour à Athis Mons.
J’allais payer quand, un vieux, très vieux monsieur, s’est approché, il avait une grosse casquette de laine sur une toute petite tête, un visage avec des rides profondes, comme des fleuves. Il me souriait et il n’avait presque plus de dents.
La caissière l’a reconnu et elle l’a salué d’un beau sourire.

C’est elle, qu’il venait voir, une femme ronde et radieuse avec les lèvres comme des fraises, toutes brillantes.
Le vieux monsieur s’est approché. Il s’est appuyé sur sa cane et il a commencé comme si de rien n’était à bavarder avec la femme.
Il y a eu un murmure d’agacement dans la queue impatiente. La caissière lui a parlé gentiment:
– Bonjour. Vous allez bien aujourd’hui ?
Et elle lui a souri de toutes ses dents bien blanches. Il lui a répondu:
– Avec le soleil, ça va. Vous avez de jolies dents. Vous avez de la chance d’avoir toutes vos dents. Prenez en soin.
– J’y fait bien attention.
Le temps s’est arrêté quelques secondes encore. Les gens remuaient ostensiblement pour faire remarquer qu’il n’avait pas de temps à perdre.
Tranquillement, le vieux monsieur a continué sa cour et il a dit:
– Je vous ai amené votre petite chanson. C’est la chanson de la petite puce et du poète.
– C’est tout a dit la caissière. Elle est toute petite votre chanson.
– Non. a dit le vieil homme, la puce et le poète, c’est que le titre, voilà la chanson.
Et le le vieux monsieur avec sa toute petite voix, comme un archet frottant un vieux violon a fredonné:
Un poète avait une puce
il l’aimait d’un bel amour
Il lui a fait coudre sur mesure
De beaux habits de cour
La puce était fort belle, je vous assurre
Il fallait la voir danser de joie
Dans sa petite robe de soie
Et le poète de la voir, ne se lassait pas
Elle était sa muse, il était son roi
Si tout cela vous amuse
Apprenez qu’en amour la taille ne compte pas
Le vieux monsieur en chantant étendait doucement ses bras comme un chanteur de music hall. le temps ne compatit plus et tout le monde souriait. La caisssière a applaudi :
– Elle est belle votre petite chanson. Elle me plaît. Pour vous remercier, je vous donne un bisou. Et maintenant filez!
Elle a embrassé le vieux monsieur qui tout heureux s’en est allé appuyé sur sa cane, un sourire bienheureux sur les lèvres et dans les yeux, une folle jeunesse.
Bip! Bip! Entre les mains de la femme qui avait repris son travail et ses esprits, les articles bipaient leur monotone petite chanson de code barre sans inspiration.
Elle m’a dit:
– Il vient tous les jours et tous les jours, il me chante ma petite chanson. C’est sacré ma petite chanson.
J’ai pris mon sac et mon chemin, dedans, du pain, du lait, mes ballons et une petite chanson.
J’ai regardé le vieil homme de son pas lent s’éloigner dans la galerie marchande appuyé sur sa cane. Il allait à une autre caisse sous l’oeil vide d’un cerbère géant noir.
Je suis parti de l’autre coté.
Chez moi, j’ai gonflé un ballon, il m’a explosé au visage. Puis j’en ai gonflé un autre et j’ai joué avec, je l’ai fait couiner puis je l’ai lâché et le ballon s’est envolé en bourdonnant et j’ai imaginé les rires des enfants.
La Vie est belle de chaque rencontre, de ces petits trésors de rien, des ces hasards des rues et des caisses que la vie nous offre en petit trésor du jour.
Mon coeur est mon âme.
Ludo